Le théâtre au début du XVIIe
Fin XVIe, le théâtre périclite en France. Les formes médiévales comme les farces ou les mystères ont disparu, les troupes et les salles modernes n'existent pas encore. La comédie est un genre mineur, délaissé par les auteurs et les théoriciens.
Au début du XVIIe, portées par le succès littéraire grandissant de textes principalement inspirés par le théâtre du siècle d'or espagnol, des troupes de comédiens commencent à se constituer, notamment à Paris. La troupe de Mondory, spécialisée en farces et en pièces à effets spéciaux décide de se fixer dans le quartier à la mode des Marais.
En 1629, les comédiens jouent Mélite, la première création de Corneille. La comédie rencontre à Paris un succès suffisant pour décider son auteur à se lancer dans une carrière dramatique. Le groupe d'acteurs devient par la suite la troupe des Marais. A partir des années 1630, le théâtre et ses protagonistes reçoivent un statut social et économique acceptable grâce à Richelieu, grand amateur de théâtre et fin politique, conscient de l'intérêt pour la monarchie de contrôler ce moyen de communication.
Le courant baroque
Les mots irrégularité, excès et désordre résument le courant baroque. Les auteurs de ce courant mélangent différents registres ce qui permet à une pièce de s'inscrire dans plusieurs registres. Ainsi Le Cidde Corneille est édité sous le nom de tragi-comédie. Il est aussi possible de montrer des actions brutales au risque de choquer le spectateur. Pour l'auteur baroque, la vraisemblance de l'œuvre n'est pas une préoccupation car la vision réaliste ne l'intéresse pas. Il est même possible de trouver dans ce courant un registre fantastique. Le courant baroque reflète l'instabilité du monde au début du XVIIe siècle. Le représentant le plus connu est Corneille, notamment avec son œuvre L'illusion comique.
Le classicisme
Au milieu du XVIIe siècle émerge un autre courant littéraire : le classicisme. Il se résume en trois mots : régularité, mesure et ordre. Ce courant rentre dans des normes, des règles extrêmement précises. On ne peut plus mélanger les registres. À cause de la règle de la bienséance, il est interdit de montrer des séquences choquantes sur scène. De même, les histoires doivent être vraisemblables et réalistes. C'est enfin le classicisme qui invente la règle des trois unités (temps, lieu et action). Le classicisme reflète la stabilité du monde et porte haut la monarchie absolue de Louis XIV. Deux auteurs sont à retenir : Racine et Molière.
Les règles du théâtre classique
De 1637 à 1640, la querelle du Cid fait rage dans le monde du théâtre suite aux représentations de la tragi-comédie de Corneille. Malgré le succès retentissant de la pièce, les ennemis reprochent à l'auteur de n'avoir pas respecté les règles de l'idéal classique.
La règle des 3 unités :
- La première de ces lois impose les trois unités qui s'appliquent à la tragédie aussi bien qu'à la comédie : l'unité d'action, de lieu et de temps. Comme l'écrira plus tard l'homme de lettres Nicolas Boileau dans L'Art poétique :
« Qu'en un jour, qu'en un lieu, un seul acte accompli
Tienne jusqu'à la fin le théâtre rempli. »Nicolas Boileau, L'Art poétique, Chant III, vv.45-46.
► La pièce doit se dérouler en un seul lieu dans un même décor, sans dépasser 24 heures, et ne présenter qu'une seule action principale. Le but recherché est de produire l'illusion que le spectateur assiste au déroulement physique de la réalité même.
- La bienséance
« Ce qu'on ne doit point voir, qu'un récit nous l'expose,
Les yeux en la voyant saisiront mieux la chose. »Nicolas Boileau, L'Art poétique, Chant III, vv.51-54.
► La bienséance impose de ne pas heurter le public de l'époque, avec des scènes violentes, des morts sanglantes ou des contacts physiques. Comme dans le théâtre grec, l'action susceptible de choquer se déroule ailleurs et un messager vient la raconter.
- La vraisemblance
« Jamais au spectateur n'offrez rien d'incroyable :
Le vrai peut quelquefois n'être pas vraisemblable. »
Nicolas Boileau, L'Art poétique, Chant III, vv.47-48
► La vraisemblance présente ce qui semble croyable dans l'attente du public.
Les auteurs doivent en outre s'inspirer des anciens, distinguer rigoureusement les genres tragique et comique, écrire en alexandrins (vers de douze syllabes) dans un style convenu et découper les pièces en cinq actes. Paradoxalement, ce carcan de règles va produire les plus grands dramaturges français et redonner ses lettres de noblesse au théâtre.