En Europe, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, les villes abritent 50 % de la population. Ces immenses déserts biologiques façonnés par l’ère industrielle n’abritent que peu de vie sauvage. Pourtant, à la fin du XXe siècle, un grand mouvement de délocalisation des usines à l’étranger entraîne leur fermeture, c’est la désindustrialisation. Peu à peu, la nature reprend ses droits, parfois là où on l’attendait le moins. C’est le cas notamment à Paris qui abrite près de 2 800 espèces sauvages, à la fois animales et végétales.
Les lieux de la biodiversité à Paris
À Paris, la nature habite ainsi de nouveaux espaces. La petite Ceinture est une ancienne ligne de chemin de fer à double-voie de 32 kilomètres qui fait le tour de Paris. Peu à peu abandonnée au profit du réseau métropolitain, la petite Ceinture est une zone de passage pour la faune et la flore. Les espèces circulent et interagissent, ce qui est indispensable au bon déroulement de la biodiversité. La Petite Ceinture est ce qu’on appelle un corridor écologique : elle connecte des réservoirs de biodiversité propices à la vie végétale et animale.
La Seine, les canaux parisiens et leurs abords, constituent également des corridors écologiques peuplés de cormorans, de mouettes rieuses, de rats musqués, d’anguilles, de crevettes caridines, de méduses et même d’éponges d’eau douce.
Outre ces espaces continus, l’écosystème urbain est façonné par ses propres constructions : les parcs et leurs mares, les jardins, les bois, les cimetières, et même les murs et les trottoirs. Les parcs et les jardins parisiens abritent ainsi des orchidées sauvages, des champignons, tels que le coprin chevelu, des abeilles, des papillons et autres crapauds accoucheurs. Les murs et les trottoirs sont peuplés de pipistrelles ─ les plus petites chauves-souris d’Europe, de lézards, de fouines et même de faucons crécerelles. La présence de cette espèce de rapace est un repère de biodiversité. Les arbres, enfin, abritent des mésanges à longue queue, de nombreux insectes ou des libellules, donc une variété porte un nom poétique : les petites nymphes au corps de feu.
L’importance du facteur humain
La ville abrite ainsi de nombreuses espèces qui s’adaptent à cet environnement. Les renards ont par exemple investi le réseau souterrain métropolitain tandis que des insectes tels que les blattes fleurissent dans les petits espaces interstitiels chauds et humides ménagés par nos matériels électroménagers. Ces espaces discontinus gagnent à être reliés entre eux. Les citadins peuvent y contribuer de bien des manières : un simple balcon fleuri attire les abeilles, principales actrices de la pollinisation et donc, de la reproduction des fleurs et des plantes. D’autres aménagements permettent de construire de véritables corridors écologiques en ville : les murs ou les toits végétalisés, les mangeoires et les nichoirs pour les oiseaux, les bacs de plantes aquatiques, les bûches percées pour les abeilles solitaires ou les fagots à insectes.
Ces corridors écologiques forment ainsi la trame verte (végétale) et bleue (aquatique) de la ville de Paris, indispensables à la préservation de la biodiversité.
Les bons gestes
En laissant ainsi la nature reprendre ses droits, en participant notamment à relier les espaces verts, les citoyens dessinent une nouvelle alliance. Un nombre grandissant d’espèces investit ainsi Paris, un mouvement général que l’on retrouve dans de nombreuses villes autour du monde. De simples terrasses fleuries attirent les insectes butineurs qui, à leur tour, attisent la gourmandise des oiseaux. La nuit, des mammifères prudents se glissent enfin sous les fenêtres des humains endormis. Nous prenons peu à peu conscience que nous sommes partie prenante de ce monde vivant, qui agit et réagit avec et dans le monde, participant de ce fait à l’équilibre fragile de la vie.