Le Voyage dans la lune
Poétique, fantastique, Le Voyage dans la lune, réalisé en 1902, est devenu le film emblématique de Georges Méliès.
Ce long métrage pour l’époque (environ 14 minutes), dont l’idée est venue à Méliès du roman de Jules Verne De la terre à la lune, raconte l’expédition lunaire de six astronomes. Ils embarquent à bord d’un obus, propulsé par un canon géant. Arrivés sur la lune, ils assistent à un « lever de terre », rencontrent la population autochtone, les Sélénites, qui les font prisonnier. Ils s’en échappent, retournent sur terre avec un Sélénite accroché à leur vaisseau-obus et sont accueillis triomphalement.
Les prouesses techniques et trucages, avec un tournage en tableaux successifs filmés en plan fixe (30 scènes), permettent un récit fluide et compréhensible sans besoin d’intertitres pour ce film muet, simplement accompagné de musique lors de sa projection. La féerie et le fantastique du Voyage dans la lune, baptisé premier film de science-fiction de l’histoire du cinéma, regorgent presque à chaque plan. Les astronomes portent des robes étoilées et des chapeaux pointus, ils combattent avec des parapluies les Sélénites qui disparaissent de l’écran comme par magie (le fameux truc de Méliès, la technique de l’incrustation). Les Sélénites sont joués par des acrobates des Folies-Bergères, les étoiles par des filles des ballets du théâtre du Châtelet. Toute la machinerie des dispositifs techniques, ainsi que les décors, le maquillage et les costumes, sont conçus sur le « lieu de tournage », aux studios de Montreuil.
L’image la plus célèbre du film, qui en fit l’affiche et est devenue l’icône du génie artistique de Méliès, est celle de l’obus planté dans un œil de la lune : l’alunissage « en plein dans l’œil ».
À sa sortie en France le 1er septembre 1902, le film connaît un énorme succès et assoit la renommée internationale de Méliès. Il fut l’objet de plagiat, de contrefaçons et de longues batailles juridiques aux Etats-Unis sur la propriété des droits.
Aujourd’hui, le spectateur peut voir le film dans sa version noir et blanc, mais aussi dans sa version couleur d’origine (un coloriage au pinceau image par image). Georges Méliès, après sa ruine, avait détruit la plupart de ses négatifs et l’on pensait qu’elle pouvait y avoir sombré. En 1993, une copie couleur est retrouvée à la Filmoteca de Catalunya, à Barcelone, dans un état de décomposition critique. Une restauration complète est engagée, pilotée par Lobster Films, et fut diffusée en avant-première mondiale au festival de Cannes en 2011.