La politique antisémite du régime de Vichy
En juin 1940, la France a subi contre l’Allemagne l’une des défaites militaires les plus terribles de son histoire. Le pays est occupé aux 3/5e et coupé en deux par une vaste frontière, la ligne de démarcation. C’est un désastre. Les institutions républicaines sont remplacées par un nouveau régime, autoritaire, incarné par le maréchal Pétain, 84 ans. Alors très populaire, le vieux maréchal prône une renaissance morale et politique de la France. Son gouvernement, installé à Vichy, en zone dite libre, tente de collaborer avec le vainqueur, maître en zone occupée. Parmi les cibles du nouveau régime, les juifs sont accusés d’être favorables au pouvoir républicain déchu et d’être des ennemis de la collaboration avec l’Allemagne de Hitler, nationale-socialiste et antisémite. Comme l’occupant, Vichy les persécute.
Des milliers de lettres envoyées au maréchal Pétain
Parmi les quelque 300 000 juifs qui vivent alors en France, plusieurs dizaines de milliers de familles sont installées depuis des siècles. Très patriotes, elles ne revendiquent aucune identité particulière, si ce n’est une pratique, privée, de la religion « israélite ». Ces familles, nommées Grunebaum, Lévy, Meyer ou Montel sont plus particulièrement choquées par la répression qui s’abat sur elles à partir de 1940. Elles ne comprennent pas pourquoi le gouvernement Pétain les persécute et ne fait rien pour les protéger face aux brimades de l’occupant. Comme tous les autres Français, les israélites sont nombreux à écrire au chef de l’État, qui fait l’objet d’un véritable culte. Tous sont persuadés que le vieux maréchal, dont la propagande loue la bonté, pourra leur rendre justice ou sauver leurs proches.
Gestion des suppliques par le commissariat général aux questions juives
Dès 1941, l’antisémitisme s’aggrave. L’occupant ordonne les premières arrestations massives (les rafles) et institue un vol systématique des biens économiques et bancaires des juifs. Vichy accepte de créer un vaste ministère de la persécution, le commissariat général aux questions juives (CGQJ), auquel on renvoie bientôt les suppliques adressées à Pétain. Tous les juifs sont frappés, volés, exclus, internés et, à partir de 1942, menacés de déportation – les victimes ignorent que l’assassinat est au bout du voyage mais toutes savent que les pires maltraitances, et sans doute la mort, les attendent.
À l’été 1942, Vichy livre aux nazis des milliers de juifs apatrides (privés de nationalité, le plus souvent d’ex-Polonais ou Allemands) et leurs enfants. Des soldats étrangers ayant servi la France, des réfugiés qui pensaient avoir trouvé un asile dans le pays, des enfants français de juifs apatrides s’adressent au maréchal Pétain ou au gouvernement, espérant une intervention miraculeuse. La réponse est toujours la même : une fin de non-recevoir lapidaire du CGQJ…
En 1943-1944, l’heure est à la traque. Beaucoup de juifs se cachent. Ils sont moins nombreux à écrire aux autorités ; ils s’en remettent à eux-mêmes et à l’aide de la population. Au bout du compte, 74 150 juifs étrangers et français ont été déportés. Seuls 4 000 sont revenus des camps de la mort.
► Consulte également le dossier sur La rafle du Vel' d'Hiv.