En 1969, François Truffaut propose L’enfant sauvage, une interrogation sur l’enfance, l’homme et la nature, le langage, l’inné et l’acquis.
Ce retour à une pensée rousseauiste juste après sa rupture (toute amicale) avec ses copains de la Nouvelle Vague, survitaminés par mai 68 et la pensée maoïste, est le tournant de la carrière de François Truffaut.
Certes, l’écoute de ses bandes-son, assez peu risquées depuis ses débuts, aurait pu avertir le cinéphile d’une évolution possible vers un certain académisme. François Truffaut va y glisser doucement dans le choix de ses thèmes, dans ses acteurs et actrices, dans sa facture même. On peut aisément voir La nuit américaine (1973) comme un solde de tout compte avec la Nouvelle Vague. Le film raconte la passion amoureuse d’un homme pour sa belle-fille avec qui il choisit de s’enfuir, mais le seul vrai personnage est le cinéma lui-même, permettant à Truffaut de jeter un regard attendri sur un cinéma qui a été et qui n’est plus. La nostalgie est là, comme elle est sous-jacente dans l’ensemble de ses films, dans l’humour ou dans le drame. La chambre verte (1978), Le dernier métro (1980), La femme d’à côté (1981) gardent un ton inimitable impulsé par ce formidable directeur d’acteur qu’est Truffaut, mais marquent une réconciliation de l’auteur avec les standards de l’industrie.
François Truffaut aura auparavant marqué lui-même cette industrie de façon indélébile. En imposant le réalisateur en haut de l’affiche comme auteur majeur d’un film, en proposant des sujets puisés dans son expérience personnelle, en renouvelant le jeu d’acteur, en posant enfin le cinéma comme un 7° art à part entière, François Truffaut est parvenu à se glisser comme classique parmi les classiques qu’il a tant aidés à comprendre. Tirez sur le pianiste, Baisers volés, Jules et Jim sont projetés régulièrement dans toutes les cinémathèques du monde (institutions que François Truffaut affectionnait particulièrement) et disséqués dans toutes les écoles de cinéma. Archétype du cinéma américain, le réalisateur Steven Spielberg est pourtant un passionné de la filmographie de Truffaut et avait réussi à le faire jouer dans l’un de ses films, Rencontres du troisième type, en 1977.
L’héritage de Truffaut et de la Nouvelle Vague dépasse les frontières hexagonales, présent dans les films du finlandais Aki Kaurismäki, de l’allemand Wim Wenders ou de l’espagnol Pedro Almodovar. La scène finale du film culte de Paul Schrader, American Gigolo, avec Richard Gere est un hommage au père spirituel de la Nouvelle Vague, Robert Bresson.