L'histoire de l'URSS, de la révolution d'Octobre en 1917 à sa dissolution en 1991, à travers une frise chronologique et les portraits de ses dirigeants (Lénine, Trotski, Staline, Khrouchtchev, Brejnev, Andropov, Tchernenko, Gorbatchev, Eltsine), de ses dissidents (Sakharov, Soljenitsyne et Chalamov) et de ses héros (Stakhanov, ZaItsev et Gagarine).
En 1914, la Russie du Tsar Nicolas II compte 170 millions d’habitants. 85 % de la population vit de l’agriculture. Le servage n’est officiellement aboli qu’en 1861. Une part considérable de ses moujiks (paysans) vivent misérablement et « ont soif de terres ». Ce sont eux qui formeront les troupes des armées du Tsar. C’est dans le contexte du cataclysme européen de 1914-1918 que va naître la Russie soviétique puis l'URSS.
Chronologie
1914 : la Russie tsariste entre en guerre à côté de l'entente anglo-anglaise
1914
- En août 1914, le Tsar entraîne la Russie dans la guerre aux côtés de l'entente franco-anglaise pour officiellement sauver « sa sœur slave » la Serbie, mais secrètement projette de s'emparer de la Galicie pour conquérir l’Arménie et Constantinople.
Dès le début de la guerre, la confrontation avec l’Allemagne, puissante et fortement industrialisée, révèle toutes les faiblesses de la Russie des Romanov. L'arriération de l'économie russe, qui combine usines ultramodernes dans quelques grandes villes et d'immenses territoires semi-féodaux, se montre incapable de nourrir, de chausser et d'armer ses troupes.
En août 1914, la bataille de Tannenberg, en février 1915 celle des lacs Mazures désagrègent définitivement les armées tsaristes.
1917-1922 : l'URSS naît dans le sillage de la guerre civile
1917
Pour dénommer les événements des révolutions russes, l’histoire a retenu les dates en fonctions du calendrier Julien, tel qu'il était d'usage à l'époque des faits.
- 23-30 février 1917 : 7 jours qui ont vu s'écrouler le tsarisme
23 février 1917 (du calendrier Julien, date correspondant au 8 mars dans notre calendrier grégorien) : à l’occasion de leur « Journée internationale », les femmes ouvrières et ménagères défilent paisiblement à Petrograd (Saint-Pétersbourg), alors capitale russe. Elles réclament du pain, le retour de leurs maris partis au front, la paix et... la République. Les difficultés d’approvisionnement liées au froid poussent un grand nombre d’ouvriers des usines Poutilov, les plus importantes de la ville, à faire grève et à se joindre au défilé.
24 février 1917 : les femmes persévèrent et réussissent à entraîner les ouvriers des autres usines. Ces ouvriers s'organisent dans des conseils (grande assemblée générale, les fameux soviets, en russe) composés de délégués ouvriers élus et révocables, tout comme ils l'avaient fait durant la première révolution russe, seulement douze ans auparavant, en 1905.
25 février 1917 : la grève a gagné la totalité des usines de la capitale. Les étudiants rejoignent le mouvement.
26 février 1917 : l’état de siège est décrété.
- mars 1917
1er mars 1917 : le Tsar nomme un nouveau gouvernement.
2 mars 1917 (15 Mars, grégorien) : alors que l’agitation a gagné toute la Russie et mis sur la touche les autorités, le Tsar abdique après avoir consulté l’état-major.
3 mars 1917 : parallèlement à la convocation d’un congrès des soviets, les représentants de l'ancienne Douma tsariste forment un gouvernement provisoire. Deux organes de pouvoir se constituent : celui des ouvriers et des soldats – le Soviet –, et celui du gouvernement provisoire. Ces deux pouvoirs ne vont cesser de s'affronter durant les mois suivants. Le gouvernement provisoire est d'abord dirigé par le prince Georgi L'vov, puis par le socialiste-révolutionnaire Alexandre Kerensky.
- avril 1917
3 - 4 avril 1917 : retour d'exil de Vladimir Ilitch Oulianov-Lénine. Il lance le mot d'ordre « Tous les Pouvoirs aux soviets ! » et proclame : « Nous sommes dans une transition de la première étape de la révolution, qui a donné le pouvoir à la bourgeoisie [...] à sa deuxième étape, qui doit donner le pouvoir au prolétariat et aux couches pauvres de la paysannerie ».
- juillet-août 1917
3 juillet 1917 : à Petrograd, vers 9 heures, 7 régiments de mitrailleurs se dirigent vers le palais du gouvernement provisoire. En route s’adjoignent des colonnes venues des usines et de nouvelles unités militaires. Les « Journées de Juillet » sont ouvertes. Sachant les insurgés isolés, les bolchéviques (fraction du Parti ouvrier social-démocrate de Russie dirigée par Lénine) tentent de convaincre les manifestants d'un retour au calme.
4 - 5 juillet 1917 : le gouvernement du socialiste-révolutionnaire Kerensky rétablit l'ordre ; les bolcheviques sont arrêtés, déportés et retournent à la clandestinité.
25 - 31 août 1917 : tentative de coup d'état militaire menée par le général Kornilov. Kerensky est contraint de faire appel aux gardes rouges et aux soviets pour sauvegarder la capitale et faire échouer le putsch. Fin août, les bolcheviques sont majoritaires dans les soviets des grands centres industriels.
- octobre 1917
7 octobre 1917 : le soviet de Petrograd se dote d'un Comité Militaire Révolutionnaire (CMR).
24 - 25 octobre 1917 : le CMR décrète et lance l'insurrection armée.
25 octobre 1917 (7 novembre 1917- Grégorien) : l'insurrection est victorieuse, les bolchéviques sont au pouvoir. Le gouvernement soviétique proclame les premiers décrets : publication et fin des traités secrets, demande de paix sans annexion (Décret sur la paix) ; la grande propriété foncière est abolie immédiatement sans aucune indemnité (Décret sur la terre).
- décembre 1917
20 décembre 1917 : formation de la Tchéka (police politique) pour faire face aux forces de la contre-révolution, aux nombreux sabotages, aux tentatives d’assassinat des dirigeants bolcheviques. Cet organisme est placé sous le contrôle d’un vieux bolchevique, Félix Dzerjinski.
1918
- 23 février 1918
Fondation de l'Armée rouge par Lev Davidovitch Bronstein dit Trotski : contre l'avis des vieux bolchéviques, il décide d'associer à cette armée, parfois sous la contrainte, des officiers de l'ancien régime qu'il fait encadrer par des commissaires politiques.
- 3 mars 1918
Signature du traité de Brest-Litovsk entre la Russie soviétique et les Empires centraux menés par l'Allemagne. Celle-ci impose des conditions très dures au jeune Etat déjà confronté à la guerre civile : la Russie perd les pays baltes, la Biélorussie, elle perd aussi l'Ukraine (son grenier à blé) au profit d’un éphémère gouvernement national (Rada).
Mise en place du « Communisme de guerre », période définie par Trotski comme « la réglementation de la consommation dans une citadelle assiégée ». Le régime se durcit, les partis soviétiques jusque-là autorisés doivent entrer dans la clandestinité, la quasi-totalité d’entre-deux ayant rejoint la contre-révolution. Des mesures « d’Etatisation économique » sont prises : nationalisation des industries (novembre 1920), monopole de l'Etat sur le commerce extérieur (4 mai 1918) puis le commerce intérieur (21 novembre 1918), réquisition des produits agricoles (décidée en mai-juin 1918), etc.
- été 1918
Anglais, Allemands, Français, Italiens, Américains, Canadiens, Polonais, Roumains, Grecs, Japonais et même Chinois interviennent ; les légion tchécoslovaques, elles, étaient intervenues plus tôt encore. Leur but commun : soutenir les armées blanches, les factions antibolchéviques et renverser le pouvoir qui en appelle, avec un certain succès, à la Révolution mondiale. À la fin de l'été, le pouvoir soviétique ne contrôle plus que la région du grand Moscou, devenue capitale.
- 30 août 1918
Une socialiste révolutionnaire, Fanny Kaplan, tire sur Lénine et le blesse très grièvement, il en gardera des séquelles jusqu’à sa mort.
1921
- 28 février 1921
Alors que la guerre civile est terminée et que l’Armée rouge est victorieuse, le pouvoir soviétique doit faire face à l’insurrection des marins de Cronstadt (célèbre base navale russe, en face de Petrograd) contre le pouvoir des bolchéviques. Bien que le soulèvement puisse exprimer une exaspération contre le communisme de guerre, le parti bolchevique, réuni à l’occasion de son Xe Congrès, se résout unanimement à l’écrasement d’une insurrection qui menace d’une reprise de la guerre civile et expose directement Petrograd.
- 12 mars 1921
Au cours de ce Xe Congrès du Parti Communiste, Lénine propose d’en finir avec le communisme de guerre. Il évoque la nécessité d’une nouvelle politique économique : La NEP (Novaïa Ekonomitcheskaïa Politika).
Celle-ci prévoit un retour, partiel et contrôlé, aux méthodes de l'économie capitaliste : une certaine liberté de commerce, une ouverture partielle aux investisseurs étrangers, une dénationalisation du commerce intérieur et des petites entreprises industrielles. L’adoption de la NEP va permettre d’améliorer la situation économique et de rétablir la confiance avec la paysannerie. Mais la NEP va aussi entraîner la formation de couches de privilégiés qui vont s’ajouter à celles qui existaient déjà : techniciens et spécialistes dont l’État Soviétique était bien obligé de rétribuer les services s’il voulait les utiliser et membres de l’appareil d’État profitant de leur situation pour apporter d’abord une solution à leurs propres difficultés économiques.
1922
- 30 décembre 1922
Un traité signé entre la République Socialiste Soviétique Fédérative de Russie, l’Ukraine, la Biélorussie et la République de Transcaucasie donne naissance à l’Union des Républiques Soviétiques Socialistes (l’URSS).
1924-1939 : l'URSS de Staline, un régime bureaucratique et un totalitarisme
1924
- 21 janvier 1924 : mort de Vladimir Ilitch Lénine. Déjà, lors du XIIe congrès du PCR, affaibli par une troisième attaque cérébrale, il ne peut s’opposer à l’ascension de celui qui a déjà concentré de façon autoritaire le pouvoir : Joseph Djougachvili Staline.
1927
- 12 novembre 1927 : Trotski, qui avec Lénine incarnait la révolution d’Octobre, est expulsé vers Alma-Ata, dans le Kazakhstan. Cet exil symbolise la victoire de Staline contre toute opposition et la mise en place de son pouvoir totalitaire.
1928
- 1er octobre 1928 : Staline met fin à la NEP. Il réactive le comité de planification – le Gosplan – et lance le premier plan quinquennal qui vise à doter l’URSS d’une industrie lourde. Celle-ci se fera au détriment des biens de consommation et de l’agriculture.
1929
- Septembre - décembre 1929 : Staline impose la collectivisation forcée des terres agricoles et la constitution des fermes collectivistes – Kolkhozes et Sovkhozes. Au nom de la lutte contre les paysans riches (les Koulaks), il se livre à une véritable guerre contre les campagnes, qui provoquera gestes de désespoir et famine.
1934
- 1er décembre 1934 : assassinat de Kirov, bolchévique depuis 1905, figure montante du Politburo (bureau politique, centre de décisions, composé de la direction du Parti). Staline accuse d’emblée l’ancien compagnon de Lénine et dirigeant de l’Internationale Communiste, Zinoviev. C’est le début des grandes purges staliniennes.
1935
- 2 mai 1935 : signature du pacte dit « Laval-Staline », pacte d’assistance mutuelle entre la France et l’URSS. Si ce pacte n’aura finalement que peu de traduction concrète, il est révélateur de la volonté de Staline de rechercher l’appui des démocraties occidentales face à la menace de l’Allemagne nazie et du fascisme. La politique des fronts populaires que le Komintern (l’Internationale communiste) met en place sera la traduction internationale de cette volonté d’ouverture vers l’ouest.
- Fin août 1935 : lancement du mouvement stakhanoviste. Ce mouvement, du nom d’Alexis Stakhanov, mineur du Donets autour duquel se construit une légende, vise à intensifier au maximum la productivité de chaque travailleur et à l’inciter à aller au-delà des quotas que lui fixe le plan. De 1933 à 1937, le second plan quinquennal met en pratique cette intensification maximale de l’exploitation, couplée à une amélioration qualitative : la productivité du travail augmente de 82 %, soit deux fois plus qu'au cours du premier plan.
1936
- 18 juin 1936 : ouverture du premier des Grands procès de Moscou, appelé Procès des seize. Zinoviev et Kamenev, proches collaborateurs de Lénine, sont les deux principaux accusés. Ils sont jugés pour la participation au meurtre de Kirov et à des « actes de sabotages ». Le 24 juin, les seize accusés sont immédiatement exécutés. Entre juin 1936 et mars 1938, Staline éradique tous les opposants à son pouvoir : monde économique et scientifique, héros de la guerre civile, puis l’opposition de droite dont Boukharine. D’une manière générale, entre 1936 et 1938, durant la période de la grande terreur stalinienne, ce sont des millions de Soviétiques qui seront fusillés ou envoyés dans les goulags (camps de travail forcé).
1939
- 23 août 1939 : signature du pacte germano-soviétique. À Moscou, Ribbentrop et Molotov, les ministres des Affaires étrangères respectifs de l'Allemagne nazie et de l'URSS, signent un pacte de non-agression. Staline espère ainsi contenir les ambitions de conquête d'Hitler vers l'est. Ce pacte prévoit des closes secrètes : le partage de la Pologne entre les deux totalitarismes et l’annexion par l’URSS des pays Baltes. Pour Staline, c’est aussi une réponse aux accords de Munich : Chamberlain pour la Grande-Bretagne et Daladier pour la France signèrent les accords de Munich, en 1938, avec Hitler et Mussolini. La Tchécoslovaquie fut sacrifiée et l’URSS écartée d’un accord de paix.
1941-1945 : l'URSS entre en guerre
1941
- 22 juin 1941 : à 3 heures du matin, plus de 3,3 millions de soldats allemands mais aussi italiens, hongrois, slovaques, roumains et finlandais envahissent le territoire de l'Union soviétique. Le nom de code de l'opération : Barbarossa. Ce jour-là, les armées allemandes enfoncent le front russe, au nord vers Leningrad, au centre vers Moscou, au sud vers Odessa et Kiev. Mais la guerre contre la Russie n’est pas la « Blitzkrieg » dont rêve Hitler. L’automne boueux, puis l’hiver glacé, la résistance acharnée de l’Armée rouge mais aussi de la population de Moscou et de Leningrad bloquent les troupes allemandes aux portes des deux capitales de la Russie. À l’hiver 1941, le front s’étale sur 3 000 kilomètres.
1943
- 2 février 1943 : victoire soviétique à Stalingrad (tournant de la guerre) : après leur échec devant Moscou, les Allemands ont entrepris, en septembre 1942, le siège de Stalingrad. Les Russes défendent farouchement chaque maison, chaque ruelle. En novembre, la 6e armée de Friedrich Paulus se trouve à son tour encerclée par les divisions Joukov. 270 000 allemands sont enfermés dans la ville, sans ravitaillement, et le Führer exige de Paulus qu’il tienne à tout prix. Des milliers de soldats sont ainsi victimes du froid qui atteint -30 °C, et Paulus capitule le 2 février 1943.
- Décembre 1943 : Staline dissout le Komintern et le 15 mars 1944 le chant L’Internationale n’est plus l’hymne de l’Union soviétique. Elle est remplacée par un hymne patriotique à la gloire de Staline.
1944
- 27 janvier 1944 : la contre-offensive de l’Armée rouge est victorieuse. Avec l’aide de la population, les soldats soviétiques parviennent à lever définitivement le siège imposé par l’armée allemande à Leningrad. Les armées du Reich sont rejetées à plus de 60 km de la ville. Pouchkine, Gatchina et Tchoudovo sont libérées. Ce siège, peut-être le plus long de l’histoire, a duré presque 900 jours ; il serait responsable de la mort de près de 2 millions d’individus.
1945
- 4 - 11 février 1945
Conférence de Yalta en Crimée. Elle réunit Roosevelt, président des États-Unis, Churchill pour la Grande-Bretagne et Staline pour l'URSS. Elle reste, pour certains, le symbole du partage du monde entre les grandes puissances occidentales d'une part, et l'URSS d'autre part. Mais Yalta n’est qu’une des conférences, l’une des rencontres qui ont jalonné la guerre. Les trois grandes puissances se sont réunies à Téhéran en novembre 1943, puis à Yalta en février 1945, enfin à Potsdam en juillet 1945. Ce sont ces conférences qui ont préparé le règlement de l’après guerre. - 20 avril 1945 : début de la bataille de Berlin. Le 20 avril 1945, date anniversaire d'Adolf Hitler, la bataille de Berlin commence par un assaut de chars soviétiques qui se heurte à une résistance allemande. Les Soviétiques envoient d'abord l’infanterie afin de « nettoyer » les faubourgs de Berlin. Pénétrant enfin dans la ville, fortement détruite à la suite des bombardements successifs alliés, le général Joukov décide de bombarder à l’arme lourde le centre-ville.
- Le 26 avril,les Soviétiques s'emparent de l'aéroport de Tempelhof, ce qui prive les Allemands du peu de soutien de la Luftwaffe.
- Dans la nuit du 30 avril, Hitler se suicide d'une balle dans la tête. Le soir même, le drapeau rouge à la faucille et au marteau flotte sur le Reichstag (le parlement allemand)
- Le 1er mai, le général allemand Weidling décide de capituler. Mais certaines poches de résistance continuent à combattre jusqu'au 5 mai.
- Le 8 mai 1945 signe la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe.
- Mai 1945
L’URSS sort de la guerre à la fois meurtrie, exsangue et grandie. Une immense partie de l’Europe est désormais zone d’occupation soviétique. Ce glacis allait, en 1947-1948, former avec l’URSS un monde à part, le « bloc soviétique », séparé de l’autre bloc par une frontière de miradors, barbelés et champs de mine. La zone d’influence soviétique s’étend sur plus de 23 400 000 kilomètres carrés où vivent 360 millions de personnes. Mais cette position nouvelle, les Soviétiques l’ont payée très cher. La guerre a fait 20 millions de morts, civils et militaires.
1947-1962 : début de la guerre froide, la formation d'un monde bipolaire
1947
L'année de la rupture, de la constitution des blocs, du début de la guerre froide. Progressivement, parfois dès janvier (notamment en Pologne), les communistes, sous la pression de l'URSS, écartent les autres partis des coalitions nationales et contrôlent seuls les appareils d'Etats.
- 22 septembre 1947 : la doctrine Jdanov répond à la doctrine Truman selon laquelle les États-Unis incarnent le « monde libre » et doivent s’opposer à l’avancée soviétique. Jdanov proclame : « Plus nous nous éloignons de la fin de la guerre et plus nettement apparaissent les deux principales directions de la politique internationale de l'après-guerre : le camp impérialiste et antidémocratique [c.-à-d. Le camp américain, l'Ouest], le camp anti-impérialiste et démocratique [c.-à-d. le camp soviétique, l'Est] ».
1949
- 25 janvier 1949 : Constitution du Comecon (Conseil d'aide économique mutuelle) : l'Union soviétique fixe désormais la nouvelle politique économique des pays situés derrière « le rideau de fer » – la Bulgarie, la Hongrie, la Pologne, la Roumanie, la Tchécoslovaquie, puis l’Albanie et la République Démocratique Allemande (RDA).
1950
- 14 février 1950 : signature du pacte sino-soviétique. Le 1er octobre 1949, le Parti communiste chinois de Mao Tsé-toung prend le pouvoir en Chine. Dès le lendemain, l'URSS de Staline reconnaît officiellement celle-ci. Alliées, Chine et URSS combattent le camp américain lors de la guerre de Corée (1950-1953). La déstalinisation entamée par Khrouchtchev sera le prétexte pour la rupture de l’alliance sino-soviétique en 1963.
1953
- 5 mars 1953 : mort de Joseph Staline. Staline mort, aucun de ses lieutenants ne peut prétendre exercer d'emblée la totalité du pouvoir qui avait été le sien. Ils se mettent d'accord pour se débarrasser du prétendant au pouvoir suprême le plus dangereux, le chef de la police politique, Béria, qui est condamné à mort et exécuté le 23 décembre 1953. Se met en place une « direction collégiale » – condamnation implicite de la manière dont l’ancien dictateur a dirigé le pays. En mars 1953, Khrouchtchev ne figure qu'au 8e rang de la direction, mais ses nouvelles fonctions de secrétaire général vont lui permettre d'évincer ses concurrents. Molotov, Malenkov, Kaganovitch et d'autres sont évincés de la direction du parti sous l'accusation d'avoir formé un groupe « antiparti » (fin 1956).
1956
- 24 février 1956 : fin du XXe congrès du PCUS – le rapport Khrouchtchev. Le congrès se tient du 14 au 26 février 1956. C’est le premier depuis la mort de Staline. Dans un « rapport secret », Khrouchtchev dénonce un certain nombre des crimes de Staline. Il dénonce avec virulence son culte de la personnalité, sa mégalomanie et ses crimes : les purges, les arrestations, les aveux obtenus par la torture, les exécutions, la déportation de peuples entiers après la guerre, la responsabilité de Staline dans la défaite militaire de l'URSS lors de l'invasion allemande et ses erreurs tactiques qui ont entraîné des centaines de milliers de morts.
Après ce congrès, le « dégel » se poursuit avec la libération de cinq millions de prisonniers en 1956. Une certaine liberté culturelle est autorisée. La « déstalinisation », même partielle, ébranle la société soviétique et surtout, les démocraties populaires. En Pologne et en Hongrie, la population se saisit de cette ouverture pour se soulever contre la mainmise soviétique. En Pologne, les autorités rétablissent violement l’ordre, et, en Hongrie, la puissante révolution ouvrière est écrasée par les chars soviétiques.
1957
- 4 octobre 1957 : l’URSS place en orbite le premier satellite artificiel de l’histoire, Spoutnik.
1958
- Mars 1958 : Khrouchtchev évince Boulganine et prend sa place à la tête du gouvernement. Il cumule tous les postes de direction, à la tête de l’Etat et du parti.
1961
- 12 avril 1961 : le cosmonaute soviétique Youri Gagarine est le premier homme à effectuer un vol dans l'espace. L’URSS semble avoir triomphé alors de son rival américain et son prestige est fortement rehaussé.
- 12 - 13 août 1961 : construction du mur de Berlin. Berlin avait conservé le statut qui était le sien à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Alors qu'en 1949 s'étaient créés deux États allemands, la République fédérale d'Allemagne (RFA) à l'ouest et la République démocratique allemande (RDA) à l'est, Berlin était resté une ville quadripartite, occupée par les armées des anciens alliés qui avaient vaincu le régime hitlérien. À l'ouest, stationnaient les troupes américaines, anglaises et françaises, tandis que la moitié est de la ville était occupée par l'armée soviétique. Berlin était enclavée dans la RDA. Dans la nuit du 12 au 13 août, les Berlinois découvrent qu’un mur sépare désormais leur ville. Ni Kennedy ni De Gaulle ne sont intervenus, contrairement à ce qui s'était passé en 1948, quand les Russes avaient imposé le blocus de Berlin auquel les États-Unis avaient réagi en alimentant la ville par un pont aérien. Pour le monde occidental, c'est surtout le signe que l'URSS de Khrouchtchev a définitivement abandonné l'idée d'une seule Allemagne.
1962-1979 : la détente ou l'équilibre de la terreurs par la dissuasion nucléaire
1962
- Octobre 1962
La crise des fusées à Cuba. Le 1er janvier 1959, Fidel Castro, Ernesto « Che » Guevara et leurs guérilleros s’emparent de La Havane. Après avoir tenté en vain d’obtenir un accord avec le gouvernement américain, ils se tournent rapidement vers l’URSS et la Chine. Depuis cette date, les Etats-Unis tentent de renverser le régime castriste. En octobre 1962, Khrouchtchev négocie un accord secret avec Castro pour l’installation de bases militaires dotées d’armement nucléaires, de bombardiers tactiques et de missiles SS-4 directement pointés vers les Etats-Unis.
Le 14 octobre 1962, des avions américains repèrent les rampes de lancements.
Le 16 octobre, le président Kennedy convoque le Conseil de sécurité nationale et propose une action militaire directe.
Le 26 octobre, Khrouchtchev décide le retrait des missiles contre une clause de non-intervention américaine sur l’île de Cuba.
1964
- 14 octobre 1964
La chute de Khrouchtchev, le pouvoir de Brejnev. À son retour de vacances, Khrouchtchev est convoqué à une réunion du Bureau politique et contraint de démissionner. Officiellement, il évoque son âge avancé et son état de santé, annonce qu'il quitte ses fonctions de premier secrétaire du Parti communiste (PCUS) et de président du Conseil des ministres de l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques (URSS). De nouveau, une éphémère collégialité organise la succession. Elle se compose d’une troïka avec Brejnev comme premier secrétaire du Parti, Kossyguine comme chef du gouvernement, et Podgorny comme chef de l'Etat. Brejnev s’empare de fait du pouvoir. Le pouvoir brejnévien, que l’on dit marqué par l’immobilisme, se maintiendra durant 18 ans, jusqu’à sa mort le 10 novembre 1982.
1968
- 21 août 1968
Les tanks des troupes du pacte de Varsovie, qui regroupent autour de l'URSS ses satellites d'Europe centrale et orientale, envahissent la Tchécoslovaquie pour mettre un terme au « Printemps de Prague ». Derrière le Premier secrétaire Alexander Dubcek, une nouvelle direction promet une ouverture démocratique. Elle tente de répondre aux aspirations tchécoslovaques en réformant les structures du régime. Tout cela est inadmissible pour Brejnev qui fait intervenir les chars. Ceux-ci se heurtent à la résistance de la population. Dubcek finit par céder, mais il ne peut éviter la révolte des jeunes qui affrontent seuls les forces d’occupation désormais alliées à la police du régime. Dubcek sera finalement écarté du pouvoir. Le « 68 » de l’Est fini dans le sang de la « normalisation ». En mars 1968, la révolte pour une voie polonaise de développement avait déjà été écrasée.
1972
- Mai 1972
Poursuite et accentuation de la détente et de la coexistence pacifique. Les accords dits de SALT I (Strategic Armements Limitation Talks), signés par Brejnev et Nixon, prétendent limiter les armements défensifs anti-missiles et surtout geler, pour 5 ans, les armes nucléaires offensives.
En juin 1979, Brejnev et Jimmy Carter signent les accords SALT II. Ces accords prévoient un contrôle réciproque des armes nucléaires. Ils seront complétés, en 1991, par l’accord START I que Gorbatchev signe avec le président Bush : les deux grandes puissances s'engagent à réduire leur arsenal nucléaire stratégique de 30 %.
1974
- 13 février 1974
Expulsion d’Alexandre Soljenitsyne d’URSS. Sous l’ordre de Brejnev, l’ex-capitaine, prix Nobel de littérature, auteur de L’Archipel du goulag, est expulsé d’URSS. Sakharov, une autre figure de l’intelligentsia, prix Nobel de la paix, sera soumis à l’exil interne à Gorki fin 1979.
1975
- 1er août 1975
Signature de l'acte final de la conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (la CSCE) à Helsinki (Finlande) par 35 Etats, dont les Etats-Unis et l'URSS. Les accords ouvrent une période de coopération économique et scientifique entre les signataires et engagent les signataires au respect de l'intégrité territoriale et à la non-ingérence.
1979-1985: l'aventure afghane et les luttes de succession
1979
- 25 décembre 1979
Les troupes soviétiques envahissent l‘Afghanistan. En 1973, le roi Zaher Shah est sur le trône depuis 40 ans. Pris entre l'Asie centrale soviétique et les alliés pro-occidentaux (Pakistan et Iran), il joue une politique d'équilibre, de « non alignement ». En juillet 1973, il est renversé par un putsch de son cousin et ex-Premier ministre, Mohamed Daoud Khan, réputé prosoviétique. La République est proclamée. Mais rapidement, les relations avec l’URSS se tendent et un premier coup d'Etat échoue en décembre 1976. C'est finalement par le biais des officiers de l'armée et d'un parti d'intellectuels « progressistes » le PDPA, Parti Démocratique du Peuple Afghan, formé dans les universités soviétiques – que le Kremlin va avoir raison de Daoud. Un coup d'Etat militaire, qui fera près de 3000 morts, le renverse en mars 1978. Cette fois, le pouvoir est remis aux civils du PDPA (divisés en deux « courants » : le Khalq, « parti du peuple », et le Parcham, « drapeau »). Noor Mohammad Taraki (du Khalq) devient président, et Hafizullah Amin devient premier ministre. Pendant les 18 mois qui vont suivre, les Soviétiques vont appuyer Taraki contre Amin. L’Armée rouge entrera finalement en Afghanistan, pour déposer Amin et le remplacer par Karmal, le plus inféodé à Brejnev.
Le 15 février 1989, le dernier soldat soviétique quitte l’Afghanistan après une guerre sanglante. L’URSS est défaite par les moudjahidines (combattants de la foi).
1982
- 10 novembre 1982
Mort de Léonid Brejnev. La nouvelle est annoncée le 11 novembre vers 11 heures du matin. Iouri Andropov, élu secrétaire général, préside les funérailles. Andropov succède donc à Brejnev en écartant son principal rival Constantin Tchernenko. Sous Andropov sont lancées des enquêtes sur des prévarications et des détournements au profit du clan brejnévien au plus haut niveau.
1984
- 9 février 1984
Après une maladie de plus de 8 mois, Andropov décède. Sa mort est annoncée le lendemain aux membres du Politburo. Michael Gorbatchev est alors pressenti pour le remplacer, mais c’est finalement Konstantin Oustinovitch Tchernenko qui est nommé secrétaire général. Tchernenko, déjà malade, meurt le 10 mars 1985 à Moscou.
1985
- 11 mars 1985
Gorbatchev, secrétaire général. Il est élu le 11 mars 1985, à 54 ans, soit 20 ans de moins que la moyenne du Bureau politique. Il annonce l’ère des « réformes radicales ». Gorbatchev prône la vérité des prix, la liaison renforcée du salaire au rendement et la lutte contre « la mentalité de propriétaire ». Il promet également des mesures contre l’alcoolisme et menace les « mauvais travailleurs ».
1986-1991 : les réformes gorbatchéviennes et la décomposition de l'URSS
1986
- 25 février 1986
Ouverture du XXVIIe Congrès du Parti communiste de l'Union soviétique. Gorbatchev y évoque la nécessité de reforme profonde du « système bureaucratique ». Les mots de Perestroïka (reconstruction) et de Glasnost (transparence) rentrent dans le vocabulaire mondial.
- 27 avril 1986
Explosion d’un réacteur de la centrale nucléaire de Tchernobyl. Pour la première fois, les autorités soviétiques rompent avec la tradition du secret et communiquent sur la catastrophe.
- Novembre 1986
Annonce de la loi sur « l’activité professionnelle individuelle ». C’est le droit de travailler seul à son propre compte. On voit sortir de terre quelques dizaines de milliers de « travailleurs individuels» (petit artisanat, petite production à domicile).
- 16 - 17 décembre 1986
Début de l’éveil des nationalismes : des émeutes contre le pouvoir « central grand russe » se produisent à Alma-Ata.
1987
- Janvier 1987
Il est décidé qu’à partir de janvier 1988, 68 sociétés d’État seront, à titre expérimental, autorisées à commercer directement avec l’Occident. C’est une brèche dans le monopole du commerce extérieur.
- Juin 1987
Gorbatchev évoque la nécessité, d’ici aux années 1990, de passer à « des méthodes de gestion économique » inspirées de celles existant à l’Ouest. Il présente toujours cela comme une amélioration du système socialiste.
- Juillet 1987
Nouvelle expression des nationalités. Les Tatars (peuples turcs d’URSS) manifestent sur la Place Rouge.
1988
- Janvier 1988
Autorisation de création de sociétés mixtes soviéto-étrangères.
- Février - mars 1988
À Erevan et au Haut-Karabakh, des Arméniens manifestent pour le rattachement de l’enclave azerbaïdjanaise à l’Arménie.
- 26 mai 1988
Vote de la loi sur les coopératives. Elle permet de créer une entreprise privée sous le vocable de « coopérative ».
1989
- 26 mars 1989
Gorbatchev crée une nouvelle Assemblée législative, « le Congrès des députés du peuple », dont les deux tiers sont des membres élus au suffrage universel, à bulletin secret, sur candidatures multiples. Les premières élections législatives qui s’en suivent sont un échec pour les candidats soutenant Gorbatchev. Gorbatchev subit la concurrence des nationalistes et de ceux qui veulent aller plus loin et plus vite dans la marche vers l'économie de marché.
- 9 avril 1989
Les forces de sécurité soviétiques répriment violemment des manifestations en faveur de l'indépendance de la Géorgie, faisant plusieurs dizaines de morts et de blessés.
- 9 - 10 novembre 1989
Chute du mur de Berlin. Gorbatchev laisse faire. En Janvier 1990, il annonce le principe de la réunification allemande. Le 3 octobre 1990, la RDA cesse d’exister, ses territoires sont entièrement absorbés par la RFA. L’Allemagne est réunifiée.
1990
- Mars 1990
Pour la première fois (il vient d’avoir les pleins pouvoirs économiques), Gorbatchev se prononce pour le « passage au marché ».
Le 14 mars, il est élu au poste de Président de l’URSS par le Congrès des députés du peuple pour un mandat de cinq ans. Au préalable, Gorbatchev avait fait adopter une réforme constitutionnelle qui crée le poste de Président de l'URSS, diminuant le rôle du chef du Parti communiste de l’URSS.
- 11 mars 1990
Le parlement lituanien proclame l’indépendance du pays. En novembre 1990 est promulgué un traité de l'Union définissant les structures d'une Union des Républiques Souveraines sur leurs territoires. Le 29 juillet 1991, la Russie reconnaît l’indépendance de la Lituanie.
- Octobre 1990
Gorbatchev reçoit le prix Nobel de la paix. La loi sur la nouvelle Constitution est adoptée, et, avec elle, le plan Chataline, prévoyant la création d'une économie de marché en 500 jours.
1991
- 9 avril 1991
Le Soviet suprême de Géorgie vote une loi sur l’indépendance nationale du pays.
- 12 juin 1991
Boris Eltsine est élu président de la Fédération de Russie.
- 19 août 1991
Le putsch d’août 1991. Gorbatchev en vacances, quelques hauts dirigeants décrètent l'état d'urgence dans tout le pays. Les putschistes annoncent vouloir restaurer un pouvoir fort afin de stopper le processus de désintégration du pays. Un « Comité d'Etat pour l'état d'urgence » déclare que Gorbatchev est incapable « pour raisons de santé » d'assumer la charge présidentielle. Boris Eltsine se dresse en opposant et déclare illégale l'action du comité. Il annonce, le 21 août, qu'il prend le commandement des forces armées. Le ministre de la défense ordonne le retrait des troupes. Gorbatchev revient à Moscou dans la nuit du 21 au 22 août. Les putschistes sont arrêtés.
- 20-24 août 1991
Gorbatchev interdit par décret l'activité du PC au sein de l'armée et du KGB. Il est contraint de démissionner de son poste de secrétaire général du PC. Le journal historique du PCUS, La Pravda, est interdit.
- 20 août-1er septembre 1991
Proclamations d’indépendance officielles : Biélorussie, Estonie, Moldavie, Azerbaïdjan, Kirghizstan, Ouzbékistan. - 29 août 1991
Dissolution du Soviet suprême d’URSS. - 17 septembre 1991
La Lituanie, la Lettonie et l’Estonie sont admises à l’ONU. Proclamation d’indépendance du Tadjikistan. - 27 octobre 1991
Proclamation d’indépendance du Turkménistan. - 1er décembre 1991
90 % des électeurs ukrainiens votent pour l’indépendance de l’Ukraine. - 8 décembre 1991
Le Russe Boris Eltsine, l’Ukrainien Leonid Kravtchouk et le Biélorusse Stanislaw Chouchkevitch signent les accords dits « de Minsk », qui dissolvent l’URSS au 31 décembre 1991 et la remplace par la Communauté des Etats indépendants (CEI). Les 12 autres républiques fédérées qui constituaient alors l’URSS sont invitées à y adhérer. Le 21 décembre, à Alma-Ata, les accords du même nom, signés par onze républiques sur les quinze, formalisent la nouvelle CEI et donc la fin de l’URSS.