Qu'est-ce que la théorie du grand remplacement ?

Invasion, submersion, grand remplacement…À en croire certains discours alarmistes, c’est la panique à bord. Mais, c’est quoi le grand remplacement ?

Quelle est l'origine de cette théorie ?

En 2001, le démographe Joseph Grimblat publie un rapport pour le compte des Nations Unies. Il imagine des scénarios migratoires prospectifs pour une dizaine de pays. Dans la presse, on lira alors ce terme devenu célèbre, pourtant absent des rapports de Grimblat : le grand remplacement. À sa sortie, le rapport passe inaperçu, mais pas pour très longtemps. Dix ans plus tard, Renaud Camus, idéologue d’extrême droite ne tarde pas à s’en saisir pour appuyer ses théories civilisationnelles. Selon elles, les populations blanches de culture chrétienne seraient peu à peu remplacées par des populations immigrées non blanches et essentiellement musulmanes, à la démographie galopante. Le terme se répand dans la presse comme une traînée de poudre. Il fait écho à une rhétorique déjà existante et pas vraiment récente, celle de la peur de l’envahisseur.

Peut-on vraiment parler d'invasion ?

Ces 20 dernières années, le nombre d’immigrés en Europe est passé de 53 à 87 millions. À première vue, c’est impressionnant mais sur cette même période, la population mondiale a connu une véritable explosion. En réalité, comparé à la population européenne, le nombre d’immigrés est passé de 7,8 % à seulement 11,6 %. En France, la proportion d’immigrés n’a que faiblement augmenté ces 20 dernières années, passant de 11 à 13 %. C’est bien en-dessous des 19 % en Allemagne et des 88 % des Émirats arabes unis. Alors, si l’immigration est certes à la hausse, les volumes ne reflètent pas une submersion démographique.

Qu'est-ce qu'il y a derrière la théorie du grand remplacement ?

La théorie du grand remplacement implique l’idée d’une invasion culturelle. Or, le remplacement par des populations d’origine africaine n’est étayé par aucune étude démographique. La natalité prétendument supérieure de certaines populations s’ajuste en réalité à celle du pays d’accueil. Autrement dit, on fait moins d’enfants dans un pays avec un faible taux de fécondité, comme en France, quel que soit le taux de natalité du pays d’origine. Cette théorie nie une réalité historique, sociale et statistique : l’immigration ne remplace pas, elle crée des mélanges. C’est ce que montre l’étude « Trajectoires et origines » menée par l’INSEE en 2022 portant sur la diversité des populations en France. Ainsi, les unions mixtes sont un facteur démographique essentiel.

Sommes-nous tous issus de l'immigration ?

Aujourd’hui, si l’on remonte jusqu’à la génération des grands-parents, 31 % de la population française est liée à l’immigration. Cela veut dire qu’1/3 des Français a au moins un parent ou un grand-parent immigré. Pour autant, seuls 5 % ont 4 grands-parents immigrés. En d’autres termes, la population issue de l’immigration ne reste pas entre soi, elle se mélange. Les populations des cultures occidentales, comme toutes les autres, sont le fruit de mélanges remontant à la préhistoire, des mélanges absorbés, intégrés, jusqu’à créer ce que l’on considère aujourd’hui, à tort, comme des entités fixes.