L'éveil des nationalités : les massacres de Chios (1822)

En avril 1822, les Ottomans massacrent plusieurs dizaines de milliers de Grecs sur l'île de Chios, pour faire un exemple. Cet évènement tragique marque l'opinion internationale qui, rompt avec ses principes, et se mobilise pour la cause grecque. Thibault Hycarius revient sur le contexte et les conséquences de ce massacre qui a mondialement marqué l'histoire du XIX^e siècle.

Congrès de Vienne et l'Europe des princes

En 1814, à la suite de la défaite napoléonienne, les différents monarques se réunissent au congrès de Vienne pour redessiner l’Europe. Ils réaffirment la supériorité du gouvernement monarchique par rapport à la démocratie. Mais, ils rejettent catégoriquement le sentiment national et le principe des nationalités. De quoi sa'git-il ? 🤔 

• Le sentiment national, pour un peuple, est le fait de ne plus se sentir uniquement sujets d’un souverain, mais aussi citoyens d’un même pays, unis par une culture, une histoire, une langue communes.
• Le principe des nationalités est le fait qu’une nation consciente d'elle-même a le droit de former un État indépendant.

À la suite de ce congrès, les Finlandais restent sous la domination russe, tout comme une majorité de Polonais. Certains Italiens se retrouvent sous la tutelle de l’Empire autrichien. Les Norvégiens sont annexés par la Suède.

► Au final, une Europe des princes se dessine, bien plus qu’une Europe des peuples.

Révolte des Grecs contre la domination de l'Empire ottoman

En 1821, le peuple grec, des chrétiens orthodoxes jusque-là sous domination de l'Empire ottoman - donc musulmane -, se révoltent. Mais les Grecs sont isolés dans leur combat. En effet, le congrès de Vienne a instauré un ordre que les monarques ont juré de respecter. Avec leurs aspirations nationales, les insurgés grecs sont clairement en opposition. Résultat : aucun gouvernement ne leur apporte leur aide. Un événement tragique va toutefois changer le cours des choses et renverser l'opinion internationale.

Massacres de Chios (1822) et déclenchement de la mobilisation internationale pour l'indépendance de la Grèce

Chios est un petite île grecque de la mer Égée, située à proximité des côtes de la Turquie. Les habitants de Chios ne s’impliquent pas dans la révolte grecque. En revanche, la richesse de l’île attire les indépendantistes qui débarquent et prennent possession du territoire. Aussitôt, le sultan ottoman envoie ses troupes armées. En avril 1822, ces soldats massacrent la population et la réduisent à l’esclavage. Sur les 100 à 120 000 personnes qui vivaient sur l’île, 25 000 sont tuées, 45 000 sont vendues comme esclaves. En Europe, l’émotion est immense et entraîne une vague de philhellénisme.

• Le philhellénisme est l’admiration pour l’héritage culturel grec et le soutien à la cause indépendantiste. Ce mouvement est accentué par la solidarité entre chrétiens, tel que l’écrivain français François-René de Chateaubriand.

La cause grecque est aussi soutenue par les artistes romantiques. Eugène Delacroix peint les « Scènes des massacres de Scio, familles grecques attendant la mort ou l’esclavage ». Victor Hugo écrit le poème « L’enfant ». De nombreux volontaires partent se battre en Grèce, dont Lord Byron, un très célèbre poète britannique qui va y laisser la vie. Des collectes de fonds sont organisées, notamment pour racheter les esclaves. En dépit des règles fixées par le congrès de Vienne, la Russie se décide finalement à soutenir les Grecs, rejointe par le Royaume-Uni et la France…
► La combinaison de l'émotion populaire et des calculs politiques a si bien fonctionné qu’en 1830, l’indépendance grecque est acquise. Dans le sillon de la Grèce, d’autres nations vont, par la suite, réclamer elles aussi leur indépendance.

👉 Découvre toutes les vidéos de la série Histoire de réviser avec Thibault Hycarius.