La monnaie : une arme géopolitique ?

Les politiques monétaires sont des armes géopolitiques qui peuvent servir à affaiblir ou déstabiliser un pays rival. Si le dollar américain domine toujours largement l’économie mondiale (60 % des réserves mondiales, et 88 % des échanges internationaux), sa puissance est de plus en plus critiquée, notamment par les pays du Sud global. Pour quelles raisons ? On t'explique tout dans Géopoliticus 👇.

Le système Bretton Woods et la domination du dollar dans le système monétaire mondial

• En 1944, 44 nations se réunissent à Bretton Woods pour garantir une stabilité économique mondiale et éviter que les déséquilibres monétaires et les crises économiques des années 1930 ne se reproduisent. Avec les accords de Bretton Woods, le dollar devient l’unique monnaie convertible en or tandis que toutes les autres monnaies sont indexées sur lui. Le dollar s’impose comme devise internationale. Deux institutions sont créées pour garantir cette stabilité : le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale.
• En 1971, le président américain Nixon met fin à la convertibilité du dollar en or, inaugurant l’ère des taux de change flottants. Malgré cette rupture, la domination du dollar dans le système monétaire mondial ressort consolidée.

Remise en cause du poids et de l'influence du dollar américain

Aujourd’hui, la domination du dollar est de plus en plus perçue par les pays du Sud global comme un frein à leur développement. Pourquoi ?

• La valeur du dollar impacte directement les économies des pays émergents. Plus le cours du dollar est fort, plus leurs dettes empruntées en dollars sont coûteuses à rembourser.
  Exemple : en 2022, la hausse des taux d’intérêt américains a renforcé la valeur du dollar, aggravant le coût des dettes libellées en dollars, notamment pour l’Argentine, la Turquie, l’Égypte et le Pakistan, qui se sont retrouvés en grande difficulté financière.
• Avec le dollar, les États-Unis imposent, dans le cadre de sanctions internationales, des mesures restrictives de nature commerciale, monétaire ou financière. Cela a pour effet de provoquer des récessions et de limiter des échanges commerciaux des États ciblés.

Vers un ordre monétaire multipolaire initié par les BRICS+ ?

Pour contrer cette domination monétaire américaine, des initiatives voient le jour :

• En 2023, les BRICS lancent l’idée d’une monnaie commune pour faciliter les échanges entre les États du groupe sans recourir au dollar. Bien que ce projet reste au stade embryonnaire, il traduit une volonté de réformer l’ordre monétaire international.
• La Chine a également exprimé sa volonté d’internationaliser sa monnaie. Pékin a conclu des accords bilatéraux avec plus d’une quarantaine de banques centrales. Objectif : leur permettre des échanges commerciaux sans passer par le dollar. Dans cette même logique, le lancement du « pétroyuan », en 2018, vise à concurrencer les pétrodollars. En outre, il permet aux pays producteurs de pétrole sous embargo américain, tels que la Russie ou l’Iran, de vendre leur pétrole en yuan.
• Les cryptomonnaies, comme le Bitcoin, permettent aux pays sous embargo, tels que l’Iran et le Venezuela, d’avoir accès au commerce international, et d’échapper aux restrictions imposées par les systèmes financiers traditionnels.

► Si, pour le moment, la domination du dollar reste solide, ces changements pourraient annoncer l’avènement d’un ordre monétaire multipolaire, où plusieurs monnaies, classiques ou numériques, coexisteraient. Des changements qui pourraient avoir pour conséquence, une perte d’influence du dollar.

👉 Découvre toutes les vidéos de la série Géopoliticus.